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14 août 2017 1 14 /08 /août /2017 10:02

La Constitution espagnole de 1812 N° 384

 

On trouvera en illustration un tableau de Franscisco Goya (1746/1828) probablement de 1812 qui est exposé à Stockholm au Nationalmuseum. Il s'agit d'une allégorie représentant la Constitution espagnole de 1812, appelée aussi « Constitution de Cadix ».

Au début du dix-neuvième siècle, les pays d'Europe étaient encore dirigés pour l'essentiel par des souverains qui se prenaient pour des représentants de Dieu sur terre comme les pharaons de l’Égypte antique et qui possédaient un pouvoir quasi-absolu.

Ce fut l'Espagne qui fit évoluer les choses, car en France, la Terreur avait dénaturé la Révolution, ses idéaux et grands principes.

Contexte historique :

En février 1801, le Consulat avait conclu un traité avec l'Espagne connu sous le nom de traité (ou Convention) d'Aranjuez : une alliance dirigée contre la Grande-Bretagne.

Dès le mois de mai, l'Espagne en avait profité pour envahir le Portugal, guerre appelée : « guerre des Oranges ». Cette guerre se termina par le traité de Badajoz le 6 juin 1801. L'Espagne récupéra la ville de Olivence au détriment du Portugal.

En juillet 1807, pour contraindre le Portugal à respecter le « blocus continental », les troupes françaises commandées par le général Junot, envahissaient le Portugal avec l'accord de l'Espagne.

Tout aurait pu être pour le mieux dans le meilleur des mondes si le roi d'Espagne, Charles IV (1748/1819), n'avait été détrôné, le 17 mars 1808, par son fils qui prenait sa place sous le nom de Ferdinand VII (1784/1833).

Père et fils firent appel à l'arbitrage de Napoléon Bonaparte.

Celui-ci les convoqua à Bayonne, mais au lieu de trouver une solution au conflit entre père et fils il imposa son frère Joseph comme roi d'Espagne.

Dans la carrière politique de Napoléon Bonaparte ce fut sa première grande faute magistrale : l'Espagne qui était notre alliée contre la Grande-Bretagne devint une ennemie acharnée.

Dès le 2 mai 1808, le peuple espagnol se soulevait contre l'armée française qui d'alliée la veille était devenue l'occupant. La répression fut terrible mais ne fit qu'aggraver la situation. Francisco Goya immortalisa les événements en 1814, avec 2 tableaux célèbres intitulés « Dos de Mayo » et « Tres de Mayo ».

Des comités de résistance s'organisèrent un peu partout et se rassemblèrent en « Assemblée Constituante » le 24 septembre 1810 à Cadix au sud de l'Espagne (ville fondée par les Phéniciens vers l'an 1100 avant notre ère).

Le 18 mars 1812, cette assemblée adoptait une Constitution, promulguée le 19, qui prévoyait le retour d'un roi espagnol dans le cadre d'une monarchie constitutionnelle héréditaire, c'est-à-dire avec un roi et son gouvernement possédant le pouvoir exécutif et une assemblée élue ayant le pouvoir législatif.

Quand Napoléon comprit qu'il ne viendrait pas à bout de la résistance espagnole, il rendit le trône d'Espagne à Ferdinand VII qui fut de retour en Espagne le 14 mars 1814 mais qui refusa de prêter serment sur la Constitution de 1812. Par décret du 4 mai 1814, il rétablissait la monarchie absolue abolissant toutes les décisions de la Constituante. En juillet 1814, il rétablissait même l'Inquisition que les Français avaient abolie en 1808 !

Cela entraîna un soulèvement en 1820 qui fut réprimé par l'intervention de troupes françaises envoyées par le roi Louis XVIII. Les insurgés furent vaincus après la bataille du Trocadéro (au sud de l'Espagne à 5 kms de Cadix)en août 1823 où se distingua Charles-Albert. Or celui-ci, fin mars 1821 avait été régent du royaume de Sardaigne, une quinzaine de jours en attendant l'arrivée du roi Charles-Félix et durant ces 2 semaines il avait proclamé une Constitution parlementaire, sur le modèle espagnol, que Charles-Félix avait immédiatement annulée. Voir fiche N°66 http://jean.delisle.over-blog.com/article-histoire-de-la-maison-de-savoie-59295182.html

Quoi qu'il en soit, cette Constitution espagnole de 1812 donna des idées et entraîna des revendications à de nombreux patriotes en Italie comme en témoigne Alexandre Dumas dans « Mémoires de Garibaldi » publiées en 1860. Extraits :

« Le carbonarisme, qui seul était appelé à donner des fruits, croissait cependant vigoureusement dans les Romagnes…

dans la nuit du 24 juin 1819, le mouvement éclata, il eut l'issue funeste qu'ont d'habitude les premières tentatives de ce genre ; toute religion qui doit avoir des apôtres commence par avoir des martyrs. Cinq carbonari furent fusillés…

dans le même moment, la même société conspirait en Lombardie, et étendait ses ramifications dans les autres provinces d'Italie…

Ce fut quelques temps après qu'éclata à son tour la révolution piémontaise. Le matin du 10 mars (1821), le capitaine comte Palma faisait prendre les armes au régiment de Gênes et poussait ce cri : le roi et la constitution espagnole… Ainsi la révolution partie d'Ancône, avait gagné Naples et était revenue à Turin. Trois volcans s'étaient ouverts en Italie, sans compter celui d'Espagne, et la Lombardie s'agitait dans un triangle de feu. 

Le roi Victor-Emmanuel 1er, on se le rappelle, avait engagé à la Sainte-Alliance sa parole de ne faire au peuple aucune concession... »

 

commentaires : il y avait eu successivement :

-l'indépendance américaine et l'adoption d'une constitution en septembre 1787

-la révolution française et l'adoption de la Constitution de 1791

-la résistance espagnole et la constitution de 1812

Pour les têtes couronnées de droit divin, cela commençait à sentir le roussi, le système hérité de nombreux siècles passés tremblait sur ses bases.

Au congrès de Vienne (1814/1815), ce fut la Sainte-Alliance de tous les souverains qui mirent une chape de plomb sur les revendications des peuples. Cela prolongea l'ordre ancien d'une trentaine d'années, puis il y eut l'année 1848 qui fut appelée « l'année des Révolutions » ou «  l'année du printemps des peuples ».

Mais aujourd'hui, les magnats du pétrole, les dirigeants des grandes banques d'affaires, ceux qui contrôlent les médias… n'ont-ils pas rétabli un pouvoir absolu mais avec des formes plus subtiles qui permettent aux peuples manipulés de se croire souverains ?

J.D. 14 août 2017

allégorie de Goya sur la constitution de 1812

allégorie de Goya sur la constitution de 1812

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