Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
6 août 2020 4 06 /08 /août /2020 17:02

Le chien de Bassano del Grappa N°655

 

C’est le 2 mars 1796 que le Directoire nomma Napoléon Bonaparte Général en chef de l’armée d’Italie. Il avait 26 ans.

Une « armée du midi » avait été créée le 13 avril 1792 et c’est à la tête de cette armée que Montesquiou s’était emparé du duché de Savoie et de Nice en septembre 1792 ; puis cette même armée avait été divisée le 1er octobre 1792 entre une armée des Alpes et une armée des Pyrénées. L’armée des Alpes fut enfin à son tour divisée le 1er novembre 1792 entre une armée de Savoie et une armée d’Italie que Bonaparte rejoignit à Nice le 27 mars 1796 puis passa en Italie où il combattit principalement le royaume de Sardaigne et l’Autriche, allant de victoire en victoire (Montenotte, Arcole, Lodi, Rivoli , Mondovi…)

Le 8 septembre 1796, Bonaparte et son armée affrontèrent les Autrichiens commandés par le général-comte (ou le comte-général si l’on préfère) Dagobert Sigmund von Wurmser (cela ne s’invente pas!) à Bassano del Grappa ville de Vénétie (voir fiche N°558 http://jean.delisle.over-blog.com/2019/07/les-duches-italiens-de-napoleon-premiere-partie-n-558.html).

Ce Dagobert autrichien n’avait pas mis sa culotte à l’envers, il n’en prit pas moins une déculottée mémorable !

Les Français récupérèrent 5 drapeaux, 35 canons attelés, 200 chariots et firent 2 à 3000 prisonniers (selon les sources).

Bonaparte avait été bien secondé par Augereau qui était entré dans Bassano par l’est ; par Masséna qui s’était emparé des canons autrichiens qui défendaient le pont de Bassano et avait pris la ville par l’ouest, mais aussi par Lannes et par Murat qui commandait déjà la cavalerie. Cette première campagne d’Italie se termina par un traité avec l’Autriche (traité de Campo-Formio du 18 octobre 1797) qui mit également fin à la première coalition contre la France.

Parcourant le champ de bataille après la victoire, Bonaparte était tombé en arrêt devant le cadavre d’un soldat tué au combat, abandonné de tous sauf de son chien !

Bonaparte à Sainte-Hélène se souvint de cet épisode et en fit le récit devant Emmanuel de Las Cases (1766/1842, il a sa statue à Lavaur dans le Tarn) qui le publia en 1823 dans « Le mémorial de Sainte-Hélène ». L’original de ce document avait été confisqué par les Anglais en 1816, restitué en 1821. Il fut retrouvé en 2005 par Peter Hicks dans les archives de la « British Library » (bibliothèque nationale d’Angleterre à Londres) et réédité chez Perrin en 2017.

Voici le texte de Bonaparte :


"Par un beau clair de lune et dans la solitude profonde de la nuit, un chien sortant tout à coup de dessous les vêtements d’un cadavre, s’élança sur nous et retourna presque aussitôt à son gîte, en poussant des cris douloureux ; il léchait tour à tour le visage de son maître, et se lançait de nouveau sur nous ; c’était tout à la fois demander du secours et rechercher la vengeance.
Soit disposition du moment, soit du lieu, l’heure, le temps, l’acte en lui-même, ou je ne sais quoi, toujours est-il vrai que jamais rien, sur aucun de mes champs de bataille, ne me causa une impression pareille.
Je m’arrêtais involontairement à contempler ce spectacle.
Cet homme, me disais-je, a peut-être des amis ; il en a peut-être dans le camp, dans sa compagnie, et il gît ici abandonné de tous excepté de son chien !
Quelle leçon la nature nous donnait par l’intermédiaire d’un animal !
Ce qu’est l’homme ! Et quel n’est pas le mystère de ses impressions ! J’avais sans émotion ordonné des batailles qui devaient décider du sort de l’armée ; j’avais vu d’un œil sec exécuter des mouvements qui amenaient la perte d’un grand nombre d’entre nous ; et ici je me sentais ému, j’étais remué par les cris et la douleur d’un chien !
Ce qu’il y a de bien certain, c’est qu’en ce moment j’eusse été plus traitable pour un ennemi suppliant ; je concevais mieux Achille rendant le corps d’Hector aux larmes de Priam."
Ce texte inspira un peintre : Thomas Jones Barker (1815/1882) qui réalisa un tableau montrant Bonaparte, le soldat et son chien. Voir illustration, emprunt au net.
On pourrait croire que le texte de Bonaparte est un commentaire du tableau mais c’est en fait l’inverse : le commentaire a inspiré le tableau. Le tableau fut repris par le graveur Charles George Lewis (1808/1880).
J.D. 6 août 2020

 

 

Bonaparte à Bassano

Bonaparte à Bassano

Partager cet article
Repost0