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17 septembre 2013 2 17 /09 /septembre /2013 15:08

Savoie-Mag (magazine du Conseil Général de la Savoie) daté de juin 2013, célèbre les 50 ans du Parc National de la Vanoise. Ce parc, le premier en France, fut créé par décret publié le 6 juillet 1963 en application de la loi promulguée le 2 juillet 1960 sur la création des parcs nationaux français (le Grand Paradis, mitoyen du Parc national de la Vanoise avait été déclaré parc national en Italie dès 1922 et avait fait suite à une réserve royale créée par Victor-Emmanuel II en 1856. Dans ce parc, la chasse aux bouquetins fut interdite depuis un arrêt du 21 septembre 1821, ce qui montre que l'Italie fut très en avance sur nous en matière de protection). On peut rapprocher ce cinquantenaire du centenaire de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques. Mais en 2013, il y eut plus de Français à savoir que le tour de France 2013 était le centième qu'à savoir que la loi sur la protection de notre patrimoine en monuments historiques fut votée il y a 100 ans.

Ce Savoie-Mag publie page 14 un article sur les gypaètes barbus. Il s'agit d'une des quatre grandes espèces de vautours européens. Le gypaète barbu disparut complètement des Alpes françaises vers les années 1930. Il fut réintroduit à partir de 1987. Voici un extrait de l'article de Savoie-Mag :

« Une caméra équipée d'un télé-objectif, placée à distance du nid d'un des couples reproducteurs formés, a récemment confirmé la présence d'un gypaéton à Termignon (en Maurienne, canton de Lanslebourg). Il est désormais possible de suivre en direct des gypaètes. Ponte, couvaison, naissance, élevage, une partie du cycle de reproduction a été suivi en direct. Chez cette espèce nécrophage (qui se nourrit de cadavres), l'aîné accapare toute la nourriture et présente un comportement très agressif envers le plus jeune, qui finit par mourir (c'est le caïnisme) . Le second gypaéton, né quelques jours après son grand frère, a, comme prévu, disparu de l'écran... ».

La lecture de ce texte m'a rappelé une note que j'avais rédigée en 1991 sur Caracalla, un des empereurs-monstres de l'histoire romaine.

Caracalla naquit à Lyon en l'an 188. Fils de l'empereur Septime Sévère et de Julia Domna d'origine syrienne, il avait un frère cadet nommé Geta, né à Rome en 189. De son vivant, Septime Sévère fit donner le titre d'Auguste à ses deux fils afin qu'ils règnent conjointement pour lui succéder. Les deux frères furent ainsi proclamés empereurs après la mort de Sévère le 4 février de l'an 211.

Mais les deux frères se haïssaient au plus haut point. Ils se murèrent chacun dans une partie du palais impérial (à Rome) et ne se déplaçaient qu'accompagnés d'une forte escorte armée. Caracalla, le plus fourbe des deux, proposa à son frère une rencontre sans armes et sans escorte en territoire neutre, c'est-à-dire dans les appartements de leur mère. Le lecteur a déjà compris que Caracalla vint armé et qu'il tua son frère le 26 décembre 211. Julia Domna tenta de protéger son fils Geta, mais le monstre acheva son frère dans les bras de sa mère qui fut éclaboussée du sang de son fils.

Caracalla n'emporta pas ce meurtre au paradis car le 8 avril 217, il fut assassiné par ses gardes en Syrie alors qu'il était descendu de cheval pour faire ses besoins.

Il doit y avoir plus de 50 ans que je n'ai pas lu de texte de Freud, mais du souvenir que j'en ai, c'est dans « Totem et tabou » (ouvrage de 1913) que Freud développe le concept de « meurtre du père ». Dans les sociétés humaines primitives, il y avait un mâle dominant dans chaque groupe comme dans beaucoup de hardes animales. La génération suivante devait « tuer le père » pour avoir eux aussi accès aux femmes etc.

Mais il me semble que tant dans la mythologie que dans la réalité, le « meurtre du frère » (pour s'emparer seul de la succession, du pouvoir …) est plus fréquent que le meurtre du père. Que ce soit le meurtre d'Abel par Caïn dans la bible, celui de Remus par Romulus dans les légendes romaines ou celui d'Osiris par son frère Seth (qui fit découper Osiris en 14 morceaux…. comme 2 fois Seth!) dans la mythologie égyptienne, les exemples abondent. Ils sont encore plus nombreux dans la réalité concrète de l'histoire. Caracalla n'étant qu'un exemple parmi une multitude de ceux qui comme le vautour de Termignon tuent leur(s) frère(s). Ainsi au quinzième siècle, Yvan III en Russie qui fit assassiner ou empoisonner ses 4 frères pour garder seul le pouvoir.

Le summum dans ce domaine semble avoir été la « loi du fratricide » dans l'empire ottoman. Les sultans avec leur harem avaient une nombreuse descendance. En cas de succession le nouveau sultan pouvait avoir de nombreux frères ou demi-frères. Il les faisait exécuter en prenant le pouvoir pour être certain qu'ils ne puissent devenir des rivaux. Il semble que ce système perdura du XVe siècle au XVIIe siècle.

J.D. 17 septembre 2013

Caracalla au musée national de Naples

Caracalla au musée national de Naples

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